Lise Topart

   Lise propose un jeu surprenant dans le cinéma français de l'immédiat après-guerre : il est sobre. Pas de cataclysmes, pas de minauderies. Dans "Les gosses mènent l'enquête", elle compose avec trois fois rien une Mariette extra-lucide et alitée. Un mouvement de menton, un clignement de cils et elle dompte la nuit, le brouillard et le vent. Dans "Sylvie et le fantôme", elle a tout juste le temps d'esquisser, avec le même bonheur, une gosse un peu hautaine qui se rêve perverse.  Un rien de variations, une mise au point au degré près. Elle travaille en astrologue les couleurs de ses personnages. Au tape à l'œil, elle préfère le panorama mouvant. Elle ne se construit pas une arène où toréer le scénario comme le feraient Gabin ou Arletty, histoire d'en extirper un prodige. Non, elle laisse venir. Sa solide formation théâtrale lui permet d'explorer avec élégance les recoins marécageux infestés de crocodiles. Elle s'est surtout consacrée au théâtre mais si elle avait vécu assez longtemps, elle aurait pu tournebouler les bourgeois de Chabrol ou distraire Clouzot de ses créatures. Hélas,  elle n'en aura pas le temps. Un crash aérien nous l'enlève au printemps 52. Et il n'est pas très sur que les réalisateurs français, gavés de "Comédie Humaine", aient fait appel à une comédienne privilégiant les rythmes océaniques.


    Photographies : Léo Mirkine / Boris Lipnitski

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